La contention en psychiatrie renvoie à une notion d'urgence et de passage à l'acte (accès au dossier "passage a l'acte"). La demande manifeste formulée par le patient, qu'il en ait conscience ou non, fait appel à une réponse qui ne peut être différée quel que soit le diagnostic posé ultérieurement par le thérapeute. Si en moyenne, 20 % des urgences psychiatriques correspondent à des décompensations d'affections psychiatriques chroniques comme les psychoses (accès au dossier "psychose") ou les troubles de l'humeur, le reste, soit 80 %, relèvent de pathologies réactionnelles pouvant mettre en jeu le pronostic vital comme les tentatives de suicide (accès au dossier "tentative de suicide"), l'alcoolisme (accès au dossier "alcoolisme"), les détresses psychosociales et les conduites pathologiques (accès au dossier "conduites pathologiques").
Important :
Les méthodes de contention et d’isolement représentent une réduction significative de la liberté de la personne, et nécessitent un cadre médical, législatif et institutionnel. Il est important de rappeler que ces mesures doivent rester thérapeutiques et relationnelles, et ne jamais devenir répressives ni punitives.
Rappels :
Mesures d’isolement sans contention L’isolement représente une limitation de l’espace d’évolution du patient et de ses contacts relationnels, sans entrave de ses mouvements corporels.
Mesures de contention sans isolement La contention n’est pas une pratique exclusivement psychiatrique puisqu’elle est utilisée aussi bien en gériatrie qu’en réanimation, en orthopédie comme en maternité ("empaquetage" des nouveau-nés pour les rassurer et leur permettre de s'endormir).
Dans la prise en charge des troubles mentaux, et en particulier des troubles du comportement, cette mesure coercitive est vécue comme l’héritière d’une psychiatrie asilaire aujourd’hui décriée. Mais au-delà des controverses, la contention reste encore une nécessité thérapeutique dans certaines situations d’urgence et de dangerosité.
Définition :
La contention d’un patient se définit comme la limitation de son autonomie et de ses mouvements au moyen d’un procédé mécanique. C’est à la fois une réponse et une prévention de ses conduites dangereuses. La contention ne limite pas les contacts relationnels du patient.
N’est pas considéré en psychiatrie comme relevant de la contention :
•le maintien bref de la personne afin de la calmer ou de la réconforter,
•le maintien plus ou moins prolongé lors d’une escorte d’un endroit à un autre,
•les dispositifs médicaux incluant des appareils pour maintenir une bonne posture corporelle ou conforter l’équilibre,
•les casques et équipements de sécurité employés pour protéger un patient des risques de traumatisme liés à une chute, ou pour éviter qu’il ne se blesse lors de mouvements involontaires.
Méthodes employées :
La contention pourra se faire au moyen de larges ceintures à bracelets pour les membres, associées à une sangle abdominale fixée au lit. Elle pourra aussi être exercée par une camisole emprisonnant les bras du patient mais lui laissant l’autonomie de la marche. Enfin il pourra s’agir de draps noués autour du torse et des membres, maintenant la personne à son fauteuil ou à son lit. Cette dernière méthode, qui présente des risques réels d’étranglement, n’est utilisée que de façon ponctuelle et sous une surveillance constante.
Indications et contre-indications :
La contention est un acte thérapeutique appliqué dans les cas suivants:
•prévention d'une violence imminente d'un patient envers lui-même ou envers autrui, quand les autres moyens d'apaisement ou de sécurité ne sont pas efficaces, ne sont pas suffisants ou ne sont pas appropriés.
•prévention d'un risque de rupture thérapeutique alors que l'état de santé impose des soins et que les autres moyens disponibles ne sont pas efficaces, ne sont pas suffisants ou ne sont pas appropriés.
Les contre-indications sont l'utilisation de la contention comme punition, répression, ou dans une recherche de confort du service aux dépens du patient.
Les contre-indications somatiques regroupent les pathologies cardiaques, respiratoires, circulatoires, ou traumatiques incompatibles avec le maintien dans la position contenue.
Les complications possibles sont les troubles du rythme cardiaque, la déshydratation, les lésions dues aux efforts du patient pour se dégager.
De tout ceci, il ressort que la contention doit rester une mesure exceptionnelle, de dernière intention, systématiquement associée aux autres techniques de prise en charge (relationnelles, psychothérapeutiques et chimiques), et qui sera interrompue dès que possible.
Prévention de la violence à l'hôpital:
L' indication de contention intervient après qu'ait été mis en place un programme de prévention de la violence ou de la rupture du soin. Ce programme doit reconnaître les signes avant-coureurs du passage à l'acte et permettre ainsi d'appliquer toutes les alternatives à la contention.
Moyens utilisés pour prévenir la violence (recommandations de l'AHQ, de l'APA et de l'ANAES):
•Adopter une attitude calme, assurée, respectueuse et rassurante,
•Exercer le soin dans des conditions prévues et aménagées en fonction de sa sécurité et de celle du patient, pour exercer son jugement sans être influencé par la peur d'un affrontement: idéalement, dans un milieu ouvert aisément accessible au secours et sans objet contondant,
•Faire en sorte que le patient connaisse les soignants, rappeler son nom ou prénom, et sa fonction, •Informer le patient de la présence continue de l'équipe soignante,
•Diminuer les stimuli auditifs en permettant aux patients "à risque" de s'installer dans un endroit calme. Eviter la présence de personnes au comportement perturbateur et solliciter si besoin la présence de tiers rassurants,
•Signifier aux patients menaçants, ayant des exigences manipulatrices ou irrationnelles, quels comportements ne peuvent pas être tolérés dans le milieu hospitalier et quelles mesures seront appliquées le cas échéant, sans que cela ne soit perçu comme un défi par le patient,
•Savoir mettre un terme à un entretien avant que le patient ne puisse plus contenir son agressivité (accès au dossier "entretien infirmier"),
•Explorer la signification de l'agressivité (accès au dossier "agressivité") sans la banaliser et favoriser son expression verbale à travers la relation d'aide et la communication (accès au dossier "communication"),
•Ne pas négliger les raisons purement médicales d'une agitation ou d'une confusion (accès au dossier "confusion mentale") qui nécessiteraient un traitement rapide,
•Vérifier l'adaptation du traitement médicamenteux,
•Inciter à la collaboration aux soins,
•... etc.
Prescription de la contention (recommandations de l'AHQ, de l'APA et de l'ANAES, protocole de contention CPOA):
•Noter l'identité du patient, ainsi que la date et l'heure de début et de fin de la contention,
•S'assurer que le trouble présenté par le patient correspond bien aux indications de contention,
•La mise sous contention se fait sur prescription médicale, d'emblée ou secondairement (au plus tard dans le quart d'heure qui suit),
•La contention initiale et chaque renouvellement sont prescrits pour une durée minimale,
•La conformité de la mise en contention avec le mode d'hospitalisation (accès au dossier "modes d'hospitalisation en psychiatrie") est examinée lors de la prescription,
•Les contre-indications somatiques sont identifiées et notées,
•Les facteurs à risque sont repérés (confusion, risque métabolique, risque médicamenteux... ) et un programme spécifique de surveillance et de prévention est mis en place,
•Le relais médicamenteux doit être institué immédiatement sur prescription médicale, sauf si la contention sert à observer l'effet d'un traitement pris antérieurement ou lorsque les troubles sont dus à la prise d'un toxique contre-indiquant les médicaments,
•Le patient reçoit les explications nécessaires sur les raisons, les buts et les modalités de mise en contention. La nécessité d'informer l'entourage et d'obtenir son consentement est examinée.
Recommandations pour la procédure (sources AHQ, APA et ANAES, protocole de contention CPOA):
•Après qu'une intervention verbale ou qu'un autre moyen de contrôle du comportement dangereux ait été considéré ou essayé, l'équipe doit former un groupe autour du patient,
•La mise sous contention est effectuée dans des conditions de sécurité suffisantes pour le patient et l'équipe de soin. Un minimum de 4 personnes, dont l'une au moins est une femme et un membre donnant les instructions, semble recommandable,
•La personne donnant les instructions doit dire au patient qu'il ou elle doit être mis en contention, expliquer brièvement les raisons et donner la direction,
•L'équipe doit donner au patient quelques secondes pour consentir mais ne plus permettre de négociations,
•A un signal pré convenu, chaque personne de l'équipe saisit et contrôle un membre du patient et une personne contrôle la position de la tête. On veille à ne pas blesser le patient,
•L'absence de tout objet dangereux sur le patient est vérifiée,
•L'équipe applique la contention, le patient est sur le dos, la tête dirigée vers la porte,
•Un membre de l'équipe veille à l'environnement du service: les autres patients, la famille. Il veille à éviter le caractère de spectacle, et ferme la porte. Il veille à prévenir la contagion de la violence,
•Les membres de l'équipe dont la présence n'est plus nécessaire sortent un par un,
•Le contact verbal est maintenu durant toute la procédure.
Recommandations pour la surveillance (sources AHQ, APA et ANAES, protocole de contention CPOA):
•Le patient bénéficie d'une évaluation médicale toutes les 30 minutes afin de déterminer si la contention est toujours indiquée,
•Le patient n'est jamais laissé seul. Il peut à tout moment communiquer avec un membre de l'équipe,
•Surveillance de l'état somatique toutes les 15 minutes, avec prise de la tension, du pouls, et vérification de la tension exercée par les contentions en place (risque d'oedème, douleur...),
•L'hygiène, les besoins et le confort du patient sont assurés durant toute la contention. Son intimité et sa dignité sont préservées,
•La surveillance biologique est prescrite,
•Les documents comprenant la feuille de surveillance, les rapports d'incidents sont intégrés au dossier du patient (accès aux informations sur le "dossier du patient"),
•Un entretien centré sur le vécu du patient est assuré en fin de processus.
Bibliographie :
Halopsy n° 20 de janvier 1999, P. Genest: "Passage à l'acte et psychose". Nervure avril 2003, A. Braitman et M.J. Guedj: "Mesures de contention sans isolement".
Soins psychiatrie n°168 d'octobre 1994: "le passage à l'acte".