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5 mai 2016 4 05 /05 /mai /2016 18:36

6,5 millions d'inscrits à Pôle emploi, une société qui se délite…, si on veut éviter l'explosion et reprendre la marche du progrès, il faut remettre la réduction du temps de travail dans le débat. C'est à cela qu'invitent 150 personnalités qui ont signé le manifeste proposé par Alternatives Economiques.

Une bataille de longue haleine

La réduction du temps de travail a de tout temps été accusée de tous les maux. Elle est pourtant au coeur de la dynamique économique et de la marche vers l'égalité femmes-hommes.

La réduction du temps de travail a de tout temps été accusée de tous les maux. Elle est pourtant au coeur de la dynamique économique et de la marche vers l'égalité femmes-hommes. L'idée que les pauvres puissent avoir des loisirs a toujours choqué les riches", soulignait le philosophe britannique Bertrand Russell en 1932 [1]. Il faisait ce constat au coeur de la crise de 1929, quand, face au chômage de masse, ceux qui prônaient une réduction du temps de travail se heurtaient à une résistance acharnée. Depuis lors, le débat n'a manifestement guère progressé. Il a même plutôt régressé en France à en juger par les discussions actuelles autour de la loi El Khomri : quatre-vingts ans après le Front populaire , qui avait promu la semaine de 40 heures et les congés payés, les socialistes, revenus au pouvoir en pleine crise, cherchent désormais à faciliter au contraire l'allongement du temps de travail.

Les pistes existent

Semaine de 32 heures ou de quatre jours, compte épargne temps, job rotation, temps partagé…, de nombreuses possibilités ont déjà été expérimentées, notamment à l'étranger. Appel : Ensemble, remettons la réduction du temps de travail au coeur du débat public

Semaine de 32 heures ou de quatre jours, compte épargne temps, job rotation, temps partagé…, de nombreuses possibilités ont déjà été expérimentées, notamment à l'étranger. Si on passait tout le monde à quatre jours par semaine, en partie grâce à une politique incitative d'exonérations de cotisations sociales, je pourrais créer 20 % d'emploi en plus", assure Arnaud Lelache. Ce patron de l'Agence française informatique (AFI), qui développe des logiciels sous licences libres, croit à la réduction du temps de travail (RTT). La moitié des 80 salariés d'AFI télétravaillent et beaucoup sont déjà à la semaine de quatre jours. Nous avons des ingénieurs, formateurs, développeurs… qui travaillent depuis Marne-la-Vallée, Annecy, Marseille. Cette organisation est facilitée par les outils numériques, la visioconférence…" Ce chef d'entreprise est-il moins compétitif que ses concurrents ?

La France compte actuellement 6,5 millions d'inscrits à Pôle emploi, 2,8 millions de plus qu'en 2008. Le chômage de masse mine depuis longtemps déjà la société hexagonale, mais ce fléau a pris une ampleur sans précédent ces dernières années. Il y a urgence à réagir. L'activité a certes repris depuis 2015 et elle pourrait accélérer encore un peu avec des politiques économiques plus dynamiques en Europe. ...

La France compte actuellement 6,5 millions d'inscrits à Pôle emploi, 2,8 millions de plus qu'en 2008. Le chômage de masse mine depuis longtemps déjà la société hexagonale, mais ce fléau a pris une ampleur sans précédent ces dernières années. Il y a urgence à réagir. L'activité a certes repris depuis 2015 et elle pourrait accélérer encore un peu avec des politiques économiques plus dynamiques en Europe. Mais avec la crise écologique qui s'aggrave, les perspectives de croissance sont limitées et le resteront. De plus, la révolution numérique et la robotisation pourraient bien, elles aussi, menacer de nombreux emplois. Il n'y a donc quasiment aucune chance que l'évolution spontanée de l'économie permette de faire reculer le chômage à un rythme suffisant pour éviter les risques d'explosion auxquels la société française est confrontée aujourd'hui. D'autres pays affichent cependant un taux de chômage plus faible que la France. Le plus souvent ce résultat est atteint grâce à un vaste secteur de "travailleurs pauvres", via une croissance massive du travail à temps partiel féminin et un retour en force du travail indépendant. Ces personnes occupent certes un emploi, mais n'en ont pas moins les plus grandes difficultés à se loger, à se soigner, à éduquer leurs enfants… Bref, à mener une vie décente. Ces politiques creusent de plus les inégalités entre riches et pauvres et les écarts entre hommes et femmes. Si on veut éviter ces écueils tout en faisant reculer rapidement le chômage, il faut "travailler moins pour travailler tous et mieux". Au tournant des années 2000, le passage aux 35 heures hebdomadaires avait eu un effet très positif sur l'emploi et l'activité, malgré certaines difficultés dans sa mise en oeuvre, notamment en matière d'intensification du travail. Il faut d'urgence reprendre ce chemin, même s'il faut probablement s'y prendre autrement, et notamment ne plus raisonner seulement sur le temps de travail hebdomadaire. Nous avons pleinement conscience de la difficulté de l'exercice tant en termes de financement que d'organisation des entreprises, mais cette question doit revenir au coeur du débat public. Non seulement pour réduire le chômage, mais aussi pour reprendre la marche en avant du progrès social et sociétal, en favorisant des modes de vie plus équilibrés et plus respectueux de l'environnement. Nous vous demandons de nous y aider en portant vous aussi ce débat sur votre lieu de travail, dans vos collectivités, vos syndicats, vos partis, vos associations… Il en va de l'avenir de notre démocratie et de notre modèle social.

Il faut baisser la durée du travail pour tous

Pour créer un choc en matière d'emploi, Dominique Méda et Mohammed Oussedik défendent une réduction collective importante du temps de travail.

Pour créer un choc en matière d'emploi, Dominique Méda et Mohammed Oussedik défendent une réduction collective importante du temps de travail. Pourquoi les 35 heures sont-elles devenues taboues ? Dominique Méda : Une machinerie idéologique s'est construite très tôt, dès la première loi Aubry (1998-1999). Les 35 heures ont été présentées comme une sorte de monstre qui aurait détruit la compétitivité et dégradé la valeur travail. L'idée a circulé, en France et à l'étranger, que les Français ne voulaient plus travailler et qu'on ne pouvait pas dépasser les 35 heures par semaine, alors que c'est simplement le seuil de déclenchement des heures supplémentaires.

Les travailleurs low cost, laissés pour compte de la RTT

Comment réduire le temps de travail des emplois ubérisés de plus en plus nombreux ?

En leur accordant enfin des droits sociaux.

Comment réduire le temps de travail des emplois ubérisés de plus en plus nombreux ? En leur accordant enfin des droits sociaux. Chefs d'entreprise, professions libérales, agriculteurs, commerçants : les indépendants échappent à la réglementation sur le temps de travail. Ils sont libres d'organiser leur temps, et leurs horaires sont souvent bien plus élevés que ceux des salariés, hors salariés en forfait jours. D'après Eurostat, les indépendants travaillent en moyenne douze heures de plus par semaine que les salariés : 51 heures hebdomadaires à temps plein, contre 39. Et ce n'est qu'une moyenne. Même si selon l'activité exercée, ils sont soumis à certaines règles sur la durée de leur travail pour des raisons de santé et/ou de sécurité.

Il y a une vie après le travail

Le passage à une société qui donnerait toute sa valeur aux activités socialement utiles pourrait notamment contribuer à résoudre l'équation travail/famille. Alternatives Economiques n° 357 - mai 2016

Le passage à une société qui donnerait toute sa valeur aux activités socialement utiles pourrait notamment contribuer à résoudre l'équation travail/famille. Deux heures et trente minutes : c'est, selon la dernière enquête "Emploi du temps" de l'Insee, la durée moyenne que les Français de plus de 15 ans passent quotidiennement à travailler. Un chiffre par certains côtés absurde, puisqu'il résulte de la division du nombre d'heures réellement travaillées par l'ensemble de la population, active ou non (étudiants, retraités…), réparti ensuite sur les sept jours de la semaine. Mais il a la vertu de nous rappeler qu'après 15 ans, les Français passent en moyenne près de 90 % de leur temps à faire autre chose que travailler ! Le travail occupe en effet une part décroissante de nos vies, mais cela résulte de plusieurs paramètres. Le premier, ce sont les importantes transformations de la structure sociodémographique française.

Sources Alternative Economie 2016

Appel : Ensemble, remettons la réduction du temps de travail au coeur du débat public

Sarah Abdelnour (sociologue, chercheuse associée à l'Irisso), Michel Abhervé (professeur associé à Paris Est-Marne-la-Vallée), Yacine Aït Kaci (artiste), Claude Alphandéry (président d'honneur de France active et du Labo-ESS), Pouria Amirshahi (député des Français de l'étranger), Gérard Aschieri (Syndicaliste FSU), Danielle Auroi (députée EELV du Puy-de-Dôme, présidente de la Commission des affaires européennes), Clémentine Autain (porte-parole d’Ensemble), Alexis Bachelay (député PS des Hauts-de-Seine), Guillaume Balas (député européen PS), Philippe Ballot (archevêque de Chambéry), Serge Bardy (député PS du Maine-et-Loire), Francine Bavay (haut fonctionnaire), Julien Bayou (porte-parole d'EELV), Rémi Bazilier (économiste, fondateur d'Ecolinks), Romain Beaucher (consultant), Simon Besnard (président du MRJC), Sophie Bessis (historienne et journaliste), Martin Bontemps (vice-président de l'Unef), Andreas Botsch (syndicaliste, conseiller du président du DGB allemand), Jean-Yves Boulin (sociologue, chercheur associé à l'Irisso), Kheira Bouziane (députée PS de Côte-d'Or), Alain Caillé (rédacteur en chef de La revue du Mauss), Fanélie Carrey-Conte (députée PS de Paris), Jean-Pierre Chanteau (économiste, université Grenoble-Alpes), Jean-Paul Chanteguet (député PS de l'Indre), Filippa Chatzistavrou (avocate et politologue), Denis Clerc (économiste, fondateur d'Alternatives Economiques), Hadrien Clouet (doctorant en sociologie), Yves Cochet (ancien ministre de l'Environnement), Daniel Cohn Bendit (ancien député européen), Christian Coméliau (économiste), Laurent Cordonnier (économiste, université de Lille), Benjamin Coriat (économiste, université Paris 13), Marthe Corpet (trésorière de l'Unef), Thomas Coutrot (économiste), Ronan Dantec (sénateur EELV de Loire-Atlantique), Francis Danvers (vice-président de l'université Populaire de Lille), Olivier Dartigolles (porte-parole du PCF), Sylvain David (professeur de sciences économiques et sociales), Jean-Baptiste de Foucauld (ancien commissaire au Plan), Caroline De Haas (militante féministe, cheffe d'entreprise), Joël Decaillon (syndicaliste, vice-président du Lasaire), Hervé Defalvard (professeur à l'université de Marne-la-Vallée), Karima Delli (députée européenne EELV), Didier Demazière (sociologue du travail), Jean Desessard (sénateur EELV de Paris), Marie Desplechin (écrivaine), François Desriaux (rédacteur en chef de Santé et Travail), Benjamin Dessus (ingénieur et économiste), Cécile Duflot (députée EELV de Paris, ancienne ministre), Marc Dufumier (professeur émérite à l'AgroParisTech), Jacques Dughera (militant associatif et syndical), Antoine Dulin (représentant des organisations de jeunesse au Cése), Pascal Durand (député européen EELV), Christine Durieux (maître de conférences en économie, université Grenoble Alpes), Marie Duru-Bellat (sociologue), Nicolas Duvoux (professeur de sociologie à Paris 8), Guillaume Etiévant (secrétaire national du Parti de Gauche à l'économie et au travail), Anne Eydoux (chercheuse au Centre d'études de l'emploi), Eric Favey (vice-président de la Ligue de l'enseignement), Sacha Feierabend (secrétaire générale de l'Unef), David Flacher (économiste, université Paris 13), Cynthia Fleury (philosophe), Fabrice Flipo (maître de conférences en philosophie), Christophe Fourel (président de l'Association des lecteurs d'Alternatives Economiques), Yann Fradin (directeur général d'une association d'insertion), Jacques Freyssinet (économiste, professeur émérite Paris 1), Jean Gadrey (économiste, professeur émérite Lille 1), Corinne Gaudart (ergonome), Vincent de Gaulejac (sociologue), Bernard Gazier économiste, professeur émérite Paris 1), François Gèze (éditeur), Pierre-Nöel Giraud (économiste, professeur à Mines Paris-Tech et Dauphine), Alain Godard (chef d'entreprise et administrateur de sociétés), Daniel Goldberg (député PS de Seine-Saint-Denis), Laurent Grandguillaume (député PS de la Côte-d'or), Alain Grandjean (économiste, fondateur de Carbone 4), Bernadette Groison (secrétaire générale de la FSU), Benoît Hamon (député PS des Yvelines, ancien ministre Jean-Marie Harribey (économiste, professeur émérite à Bordeaux, coprésident du conseil scientifique d'Attac), Pierre Héritier (syndicaliste, fondateur du Lasaire, vice-président du Forum syndical européen), Eric Heyer (économiste), Michel Husson (économiste, chercheur à l'Ires), Sabina Issehnane (économiste, membre du CA des économistes atterrés), Yannick Jadot (député européen EELV), Florence Jany-Catrice (économiste, université Lille 1), Arthur Jatteau (doctorant en économie et en sociologie), Antoine Jeammaud (juriste, professeur émérite Lumière Lyon 2), Rémy Jeannin (professeur de sciences économiques et sociales), Thierry Jeantet (président du think tank Mars), Wojtek Kalinowski (codirecteur de l'Institut Veblen), Pierre Khalfa (coprésident de la Fondation Copernic), Michel Lallement (sociologue, professeur au Cnam), Aurore Lalucq (codirectrice de l'Institut Veblen), Bruno Lamotte (économiste, université de Grenoble Alpes), Bruno Lamour (président du Collectif Roosevelt), Dany Lang (économiste), Bernard Laponche (économiste, expert en politiques de l'énergie), Pierre Larrouturou (économiste, coprésident de Nouvelle Donne), Elena Lasida (économiste), Pierre Laurent (secrétaire national du PCF), Germain Lefevre (président de la scop Oxalis), Arnaud Lelache (chef d'entreprise), Daniel Le Scornet (mutualiste), Lila Lebas (déléguée générale de l'Unef), Arnaud Lechevalier (économiste, maître de conférences à Paris 1), Philippe Légé (économiste, maître de conférences à l'université de Picardie), Emeric Lendjel (économiste, maître de conférences à Paris 1), Frédéric Lerais (économiste), Marie-Noëlle Lienemann (sénatrice PS de Paris), Pascal Lokiec (juriste, professeur à Paris Ouest-Nanterre-La Défense), Edouard Martin (député européen PS), William Martinet (président de l'Unef), Philippe Martinez (secrétaire général de la CGT), Christiane Marty (chercheuse, membre du conseil scientifique d'Attac et de la Fondation Copernic), Serge Mas (économiste), Gustave Massiah (économiste), Antoine Math (chercheur à l'Ires), Emmanuel Maurel (député européen PS), Dominique Méda (sociologue, professeure des universités), Michel Mousel (président de l'Institut tribune socialiste), Pierre-Alain Muet (député PS du Rhône), Claude Neuschwander (consultant), Jean-Luc Outin (économiste, membre de l'Onpes), Bruno Palier (directeur de recherche au CNRS, Sciences-Po), Arnaud Parienty (professeur de sciences économiques et sociales), Dominique Paucard (Syndex, responsable du pôle restructurations), Christian Paul (député PS de la Nièvre), Jean-Marie Perbost (journaliste chez Ask Média et enseignant), Bernard Perret (socio-économiste), Camille Peugny (maître de conférences en sociologie), Claire Pignol (historienne de la pensée économique à Paris 1), Nicolas Pinsard (doctorant en économie à Paris 13), Dominique Plihon (économiste), Philippe Pochet (professeur à l'Université catholique de Louvain), Jean-Claude Pons (maire de Luc-sur-Aude), Thomas Porcher (économiste), Jean-François Poupard (directeur de Syndex), Nicolas Postel (économiste, université de Lille 1, secrétaire de l'Afep), Emmanuelle Puissant (économiste, université de Grenoble), Gilles Raveaud (économiste, université Paris 8), Denys Robiliard (député PS du Loir-et-Cher), Michel Rocard (ancien Premier ministre), Barbara Romagnan (députée PS du Doubs), Maria Roubtsova (doctorante en économie à Paris 13), Guy Roustang (chercheur en économie et sociologie du travail), Eva Sas (députée EELV de l'Essonne), Lucile Schmid (vice-présidente de la Fondation de l'économie politique), Dominique Sicot (journaliste), Camille Signoretto (chercheuse au Centre d'études de l'emploi), Gabrielle Siry (secrétaire nationale du PS à l'économie), Richard Sobel (maître de conférences en économie à Lille 1), Olivier Szulzynger (éditeur et scénariste), Dominique Taddéi (économiste), Pierre Tartakowsky (journaliste et militant associatif), Bruno Théret (directeur de recherche émérite au CNRS), Fabien Verdier (secrétaire national du PS pôle production et répartition des richesses), Denis Vicherat (éditeur, éditions Utopia), Patrick Viveret (philosophe), Claire Vivés (chercheuse au Centre d'études de l'emploi), Serge Volkoff (statisticien, directeur de recherche au Centre d'études de l'emploi), Pierre Volovitch (ancien chercheur), Dominique Voynet (ancienne ministre), Philippe Watrelot (professeur de sciences économiques et sociales), Michel Wieviorka (sociologue), Jean-Pierre Worms (sociologue), Muttiah Yogananthan (chef d'entreprise).

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