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4 mars 2014 2 04 /03 /mars /2014 16:27

Les troubles de la déglutition (ou dysphagie) sont fréquents chez la personne âgée et peuvent représenter une menace vitale. Ils ont pour conséquences une dégradation progressive des capacités de déplacement et des défenses immunitaires, ainsi qu’une baisse générale de la qualité de vie. Leur dépistage est à la portée de chaque praticien. Avec comme objectifs de sécuriser la déglutition, minimiser les risques de bronchoaspiration et enrayer une perte pondérale progressive.

Le vieillissement de la déglutition (ou presbyphagie) est un problème réel de santé publique. La dénutrition que ces troubles entraînent touche en moyenne 5 à 10% des personnes âgées vivant à domicile et 30 à 60% de celles résidant en institution. Il est encore peu perceptible à 65 ans mais il devient important dès 80 ans, surtout, lors de maladies neurodégénératives, de traitements oncologiques ou après des accidents. Jusqu’à cet âge avancé, les anomalies de la déglutition sont le plus souvent bien tolérées, peu ou pas symptomatiques. Une étude radiologique, réalisée auprès de 56 personnes ayant un âge moyen de 83 ans sans plainte dysphagique, a révélé que seuls 16% d’entre elles avaient une déglutition strictement normale.

Les effets de l’âge

Les mécanismes mis en jeu lors de la déglutition s’altèrent avec l’âge. Ils correspondent à un vieillissement à la fois mécanique et neurologique. Entre 60 et 70 ans, on estime la fonte musculaire de 25 à 30% de son volume initial et la perte de force de 30 à 40%. Ce phénomène est individuel et dépend de l’entretien musculaire et des activités du sujet. En outre, 25% environ des personnes âgées se plaignent d’une bouche trop sèche. Le flux salivaire est diminué par la plupart des médicaments (antihistaminiques, antihypertenseurs, diurétiques, antidépresseurs). 60% des personnes de plus de 65 ans sont édentées et portent des prothèses plutôt anciennes, usées et mal adaptées. L’efficacité de la mastication reste bonne si la dentition est intacte. Elle diminue de 30 à 75% lors du port de prothèses dentaires. Ces dernières altèrent les sensations gustatives et la sensibilité buccale. Enfin, la perte du goût du sujet âgé est liée à la diminution du nombre de papilles gustatives et à la baisse de la sensibilité des récepteurs sensitifs. La perception du sucré est la première altérée, puis celle du salé et des saveurs acides. Le sujet se plaint d’une bouche amère et modifie ses préférences alimentaires (recherche d’aliments plus sucrés). L’odorat, qui intervient pour 80% dans notre perception des flaveurs, se dégrade systématiquement dès l’âge de 65 ans.

Dépistage et traitement de la dysphagie

En vieillissant, les troubles de la déglutition se manifestent par des symptômes souvent vagues, dépendant de facteurs environnementaux. Il est fréquent qu’ils restent non-diagnostiqués durant plusieurs années, le sujet compensant sa gêne par une modification progressive, insensible, de son alimentation et de sa posture. Ils deviennent brutalement évidents à l’occasion de complications. Ce sont principalement les patients souffrant de pathologies neurologiques dégénératives, d’affections cancéreuses ou ayant subi une cassure de leur rythme de vie (accident, intervention chirurgicale, deuil) qui sont concernés.

Le médecin généraliste peut proposer des soins simples à mettre en place. Comme le maintien d’une bonne hygiène buccale, avec brossage des dents puis rinçage buccal soigneux, à plusieurs reprises, afin de diminuer la charge bactérienne salivaire et son rôle pathogène dans les surinfections bronchiques ; la position assise, redressée, du sujet pour toute prise de boisson ou d’aliment; des liquides rendus onctueux par l’adjonction d’une poudre épaississante afin d’être déglutis lentement, gorgée après gorgée, et servis dans un verre évasé, évitant le redressement mentonnier. Ou encore des aliments découpés, émincés ou mixés en fonction du déficit masticatoire, rendus plus homogènes et onctueux par adjonction de sauce. La réadaptation des prothèses dentaires est souvent nécessaire.

Si ces mesures restent insuffisantes, diététicienne, ergothérapeute et logopédiste interviennent pour évaluer et adapter les apports alimentaires, l’installation du sujet et ses gestes d’alimentation. La physiothérapie respiratoire permet d’améliorer le drainage bronchique et d’entraîner une toux plus efficace. Une hydratation ou une alimentation complémentaire par sonde doit parfois être envisagée. Une alimentation récréative peut le plus souvent être maintenue permettant de préserver un certain plaisir de manger. Chez la personne âgée, les limites éthiques d’une nutrition par sonde sont discutées de cas en cas. Elles commandent de ne pas s’acharner, mais aussi de ne pas négliger une dénutrition progressive.

Adapté de «Troubles de la déglutition de la personne âgée», Dr Valérie Schweizer, Unité de phoniatrie et de logopédie Service d’ORL et de chirurgie cervico-faciale, CHUV, Lausanne in Revue médicale suisse 2010;6:1859-62, en collaboration avec les auteurs.

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commentaires

J
Vous avez raison, la prise en compte de la difficulté que peut éprouver la personne âgée pour s'alimenter doit être une préoccupation des personnels soignant. En mangeant avec difficulté, la notion de plaisir disparaîtra et l'envie de vivre et de continuer à avoir des projets aussi.
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J
Jean-Françpis,<br /> Merçi d'avoir lu mon article.<br /> Cordialement.<br /> JYP